C’est avec une profonde tristesse que nous apprenons le décès de Monsieur Alexandre Lapraye survenu le 21 novembre à Saint-Jean-de-Védas (Hérault).

Alexandre Lapraye nait le 2 octobre 1927 à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire). Il perd sa mère à l’âge de 7 ans et son père, deux ans plus tard, se remarie avec une marâtre qui le maltraite et  qui pèsera lourdement dans la destinée du petit garçon.
En 1940, Alexandre assiste à la débâcle des troupes françaises et son village, après l’armistice de juin se retrouve à 4 km de la ligne de démarcation, en zone occupée.

La résistance

En 1941, Il rentre dans la résistance au sein du mouvement « Combat ». Il distribue des tracts pour l’organisation.
Sa belle-mère devient la maitresse du chef de la Feldgendarmerie locale. Elle se rend dans les prisons du secteur et joue la fausse détenue pour recueillir les témoignages des prisonnières.
Un jour, Alexandre, pris d’un accès de colère, se révolte et la frappe avec un broc, la blessant à l’épaule. Embarqué par les Feldgendarmes, il est finalement relâché après un sérieux avertissement.
En 1943, Alexandre participe à des sabotages contre le canal du Centre par lequel transitent des sous-marins de poche allemands. Puis, il effectue des missions de liaison entre ses chefs et le maquis local qui nait suite à la création du Service du Travail Obligatoire.

Arrestation et déportation

Le 9 décembre, sa belle-mère  est abattue par un résistant. Soupçonné à tort, Alexandre est arrêté. Emprisonné à Chalon-sur-Saône, il est torturé. Transféré à la prison de Dijon, il est jugé est condamné à mort le 23 février 1944.
En raison de son jeune âge, sa peine est commuée en travaux forcés à perpétuité. Le 6 mars, il est transféré au Cherche-Midi, l’une des prisons où les nazis regroupent les résistants tombant sous le coup du décret Nacht und Nebel.
Le 23 mars, il part en direction de la gare de l’Est avec  66 autre détenus du Cherche-Midi et de Fresnes. Le convoi, ainsi formé, est le treizième à partir de Paris en direction du KL Natzweiler.
Alex y est immatriculé sous le N° 8623. Il est affecté au Kommando de déneigement. Le travail exténuant,  le froid, la faim, les coups pèsent rapidement sur la santé de l’adolescent. Il perd connaissance lors d’un appel et est difficilement admis au Revier. Il y fait la connaissance du général Frère, chef de l’Organisation de résistance de l’Armée. Une fois guéri, grâce à l’aide d’un médecin français, il reste au Revier comme aide-infirmier. Il est chargé des pénibles corvées de soupe mais aussi de celle du transport des cadavres au crématoire.
En août, la résistance française du camp apprend qu’Alex doit être transféré à Breslau pour y être à nouveau jugé. Ce transfert ayant le caractère d’un voyage sans retour, les médecins français du Revier décident, pour le rendre intransportable, de l’opérer d’une appendicite imaginaire. Sauvé par ses courageux camarades, Alex ne partira jamais à Breslau.
Début septembre, il est évacué, comme l’ensemble des déportés de Natzweiler vers le camp de concentration de Dachau en Bavière. Il y reçoit le matricule 102916.
Il bénéfice là encore de la précieuse aide et de la solidarité des médecins français. Il est à nouveau affecte au Revier mais en novembre, il y contracte le typhus. La bonne étoile d’Alex veille encore. Il survit à la maladie et est affecté au service postal du Revier. Un vieux gardien SS, « il n’était pas plus SS que moi » déclare Alex, le prend sous son aile, lui donne à manger et des nouvelles de la guerre.
Le 29 avril 1945, le cauchemar d’Alex prend fin. Le camp est libéré par les Américains.
Atteint par la tuberculose, ne pesant qu’une quarantaine de kilos, Alex est enfin libre.

Sur les 67 hommes partis de Paris le 23 mars 1944, 34 au moins sont morts en déportation.

Un homme engagé pour la mémoire

Alexandre Lapraye était l'un des fondateurs du musée de la Résistance et de la Déportation de Tarbes. Infatigable témoin, il a transmis durant de nombreuses années aux scolaires la mémoire de ses combats et de ses compagnons.

 

Le Centre européen du résistant déporté adresse ses profondes et sincères condoléances à la famille et aux proches de Monsieur Lapraye.

Crédit photo :
Jean-Luc Schwab.

Sources:
Ville de Tarbes. Témoignage d'Alexandre Lapraye
Livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation
1943-1945,La résistance en enfer, ouvrage collectif, Editions Messidor, 1991.

 

RC